Les Bijoux Talisman
LES BIJOUX TALISMAN
Dans la région de Taza, se fredonnait une chanson: «les femmes de la montagne arrivent au souk et leurs bijoux tintent à chaque pas »!
Pour attirer les regards ? Pour faire fuir les mauvais génies ? Tout à la fois ! Dans un pays chargé de symboles et traditions le port et l’offrande de bijoux est une habitude séculaire.
On distingue 2 familles de bijoux au Maroc, les citadines, dorées et les Berbères en argent. Pourquoi cet engouement pour l’argent ? Outre son faible coût par rapport à celui de l’or, sa blancheur, symbole de pureté lui donne un pouvoir protecteur renforcé par la représentation de signes divers comme autant de porte-bonheur.
Bien avant l’arrivée de l’Islam, Juifs et Berbères se côtoyaient dans tout le pays. Au-delà des différences de culture et de religion, on trouve un lien étroit dans la forme des bijoux indifféremment portés par Juives et Musulmanes. Devant les interdits de l’Islam qui prohibe le travail et le négoce des métaux précieux, ce sont les Juifs qui ont exercé cette profession jusqu’à leur départ massif au milieu du 20° siècle.
Portée par la « rose de Mogador » la réputation d’Essaouira dans le domaine de l’orfèvrerie a rayonné dans le monde occidental jusqu’au milieu du siècle dernier ; Dans la région du sud de la ville, on recensait au 16° siècle près de 2500 artisans chez les Aïd Daoud. Dans le monde Berbère, la terre va traditionnellement aux garçons. Par compensation, les familles offrent des bijoux aux filles, selon leurs moyens, afin de leur constituer une sorte de dot. En dehors des somptueuses parures de noces, un simple bijou est symbolique, protecteur et caractéristique de chaque région.
Les lourds bracelets de poignets et de chevilles servaient de rempart contre les génies (Jnoun) sur les seules parties du corps découvertes. Il existe dans les préparatifs des mariages berbères toute une symbolique autour des bracelets afin de favoriser la prospérité du jeune couple.
Les fibules, indispensables au maintien des vêtements sont riches de révélations sur l’origine sociale et régionale. Elles sont transmises par paire, de mères en filles, en gage de fertilité, fécondité, amour. Le port d’une fibule unique peut signifier le célibat. Leur aspect triangulaire serait la représentation d’une tête de bélier…
Les Khmissa, cinq ou khemsa, sous toutes leurs formes représentent la main du bonheur, la «baraka». Symboles de protection, les musulmans la désignent comme « Main de Fatma », la sœur du Prophète.
Sur les bandeaux de têtes, peaux de chèvres ornées de plaquettes d’argent ciselé ou de verroterie diverse, on trouve multitude de pièces d’argent ou bronze, bien utiles à la datation de l’objet. Diadèmes, Pectoraux, Pendants de tempes, Boucles de ceintures ne sont plus portés en dehors des fêtes et la taille des bijoux d’aujourd’hui a diminué, faisant toujours ressortir les délicats motifs géométriques berbères. Les différentes techniques, moulage, émaillage, ciselure, martelage, cloisonnage, ont traversé les siècles en s’adaptant aux dictats de la mode. Seul le travail de la NIELLE, mélange noir provenant de sulfures d’argent, de cuivre, plomb et soufre, est en voie de disparition. Le filigrane, spécialité d’Essaouira, est à contre courant des phénomènes de mode actuels mais dans l’atelier de la Coopérative, on forme bénévolement des jeunes gens, pour que se perpétue la tradition…
Avec l’aimable contribution de : La coopérative des Bijoutiers du Centre Artisanal d’Essaouira et l’Amine (chef Artisan) Noureddine BOUMAAZA.